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Les Championnats de France

Nos III VIII

Les championnats de France. Ce pour quoi tant de sueur a été versé dans les étangs de Cergy, ce pour quoi tant d’ampoules se sont creusées dans les mains endurcies de nos rameurs, ce pour quoi tant fois les coups de pelle dans l’eau aurorale ont remplacé le champ du coq. Une saison. Jouée sur une course. Telle peut être conçue l’attente qui fait le mythe de cette épreuve nationale. 

Ainsi, vers le début du mois de mai, alors que le monde redécouvre le charme pastoral du printemps, le Club Aviron ESSEC s’engage sur la route escarpée qui le mènera à l’épreuve finale, le dernier acte d’une odyssée entamée il y a huit mois. Huit mois pour huit rameurs pour préparer ce qui sera pour certains la course d’une vie. 

Le matin des championnats
Le Lac de Causse

La saison passée, ces championnats ont eu pour scène le Lac de Causse, site naturel époustouflant à proximité de Brive où une végétation d’une verdure à faire pâlir l’Eden borde un plan d’eau qui inspirerait jusqu’au plus sombre des poètes. Après une longue pérégrination depuis la capitale, nos équipages rejoignent le long cortège de plusieurs centaines de rameurs qui montent leurs esquifs sur les bords du bassin. 

S’ensuit une courte nuit où l’excitation se fait l’ennemie du sommeil, et voici que le soleil sonne le tocsin du grand tournoi. Réveillés aux aurores, nos rameurs sont vite sur pied, et encore plus vite sur l’eau. Après un premier échauffement aux premières lueurs, nos équipages s’attèlent aux derniers préparatifs avant la grande épreuve, et patiemment ils attendent leur tour. Les mots se font rares, la tension palpable. Voilà qu’on les appelle. Il faut y aller.

Avant la grande course
Le 4x masculin au CFU

Le lac, paisible décor à l’onde d’ordinaire si calme, devient le temps d’un bref interstice le théâtre d’une lutte âpre, ardente, et endiablée : le départ a été donné. D’un seul trait, d’un coup d’un seul, cet impassible tableau bucolique devient cet amphithéâtre antique où ne manquent plus que les gladiateurs. Mais cette absence est vite comblée par l’éclosion de ces athlètes qui laissent tomber leur masque d’étudiants habitués aux milieux feutrés pour mieux dévoiler leur vrai visage, celui de bretteurs prêts à tous les efforts pour décrocher la victoire et ses immortels lauriers.

À présent, c’est une lutte pour ceux qui parviendront à repousser le plus loin les limites de l’impossible et qui feront les premiers traverser à leur frêle esquif les mille petits mètres qui bordent ce champ de bataille. Les coups de rame frénétiques rythment désormais la cadence infernale de ces vaisseaux qui semblent tout droit sortis des bouillons marins de l’Hadès. Et si cette distance est courte, elle n’en paraît pas moins interminable aux yeux de plus en plus fébriles de nos rameurs à mesure qu’ils parcourent le bassin. Une année de sacrifice, de privation et d’effort se joue sur cette centaine de mètres qui sépare désormais ces rameurs possédés de l’arrivée libératrice. 

Le VIII masculin au CFU_edited.jpg
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La tension est à son paroxysme, les rameurs obstinés par leur coup d’aviron n’entendent déjà plus les instructions hurlées par le barreur, les corps épuisés vont chercher dans leurs réserves les plus profondes de quoi continuer leur effort titanesque, les dents se serrent et les regards se ferment, et les navires vomissent toute la puissance physique qu’ils peuvent transmettre à l’eau virevoltée. Mais si l’effort paraît n’en plus finir, par cette étrange relativité du temps, la course s’achève rapidement, et en un clin d’œil les esquifs éprouvés ont franchi la ligne d’arrivée, cette fine mais impardonnable frontière entre le calme et la tempête.

La clameur des vainqueurs emplit la vallée de Causse tandis que les sanglots des vaincus abreuvent le lac, cette arène d’une journée. Mais si les sentiments sont contrastés, le soulagement n’en est pas moins général, et la satisfaction de l’effort mené à son terme et la fierté de tout ce qui a été accompli prédominent sur ce qui s’avère finalement n’être qu’une préoccupation secondaire : le classement. Car la vraie leçon est là, et il faut avoir vécu une de ces journées enfiévrées pour en ressentir toute la vérité : ce que les rameurs viennent chercher dans ces championnats, ce ne sont pas vraiment les médailles. 

Le CAE aux Championnats de France

Ce sont des moments forts, l’accomplissement d’un effort physique qui a demandé une grande discipline, et par-dessus tout le sentiment d’avoir travaillé en équipe à la réalisation d’un objectif commun, de s’être dépassé non seulement pour soi mais aussi pour ses camarades. Les valeurs du sport en somme. Et si l’affrontement sur l’eau a été sans relâche, le plus grand des fairplays règne en dehors du bassin. Une fois les courses passées, l’ambiance est festive et enjouée. Chacun se congratule et les deux journées de compétition s’achèvent sur cet esprit allègre et sémillant qui animera notre groupe jusqu’à son retour sur Paris dans la nuit constellée de ces beaux souvenirs.

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